35H DANS LES COLLECTIVITÉS : LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DONNE RAISON AU GOUVERNEMENT

Le législateur peut-il, par l’article 47 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, contraindre les collectivités territoriales à porter à 1 607 heures le temps de travail annuel de leurs agents ? Ou a-t-il, ce faisant, méconnu le principe de libre administration des collectivités territoriales et le principe de liberté contractuelle ? Saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) sur le temps de travail dans les collectivités par quatre communes du Val-de-Marne, le Conseil constitutionnel a tranché ce vendredi 29 juillet : les 35 heures doivent bel et bien s’appliquer dans toutes les collectivités territoriales.

En vertu du premier alinéa de l’article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les collectivités territoriales fixent les règles relatives à la définition, à la durée et à l’aménagement du temps de travail de leurs agents dans les limites applicables aux agents de l’État, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités.

L’article 47 de la loi de transformation de la fonction publique met fin à cette faculté. Il impose en effet à toutes les collectivités ayant maintenu un régime dérogatoire sur le temps de travail des agents de faire appliquer les 1  607 h de travail annuel à leurs agents, dans les limites applicables aux agents de l’État.

Malgré la réforme, certaines collectivités ont refusé d’appliquer les 1.607 heures à leurs agent.es, notamment cinq communes de Seine-Saint-Denis. Le tribunal administratif a suivi le préfet et leur a ordonné de « veiller à l’adoption des délibérations fixant le temps de travail de leurs agents et de les transmettre au préfet de la Seine-Saint-Denis, dans un délai de quarante jours ». Dans le Val-de-Marne, quatre villes refusent d’appliquer les 1 607 heures à leurs agents : Fontenay-sous-Bois, Vitry-sur-Seine, Ivry-sur-Seine et Bonneuil-sur-Marne. 

Selon elles, la loi de transformation de la fonction publique ne respecterait pas l’article 72 de la Constitution, qui prévoit la libre administration des collectivités. Face à ces résistances, la préfète du Val de Marne a saisi le tribunal administratif de Melun.

Les juges ont accepté de transmettre au Conseil d’État une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) posée par les maires, sur le fond : l’obligation faite aux maires de faire appliquer les 1 607 h est-elle compatible avec le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales ?

Le Conseil d’État, par une décision du 1er juin, a renvoyé cette question au Conseil constitutionnel qui estime, dans sa décision n° 2022-1006 QPC du 29 juillet 2022 :

● En premier lieu, « que le législateur a entendu contribuer à l’harmonisation de la durée du temps de travail au sein de la fonction publique territoriale ainsi qu’avec la fonction publique de l’État afin de réduire les inégalités entre les agents et faciliter leur mobilité. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d’intérêt général ».

● En second lieu, que « les dispositions contestées se bornent, en matière d’emploi, d’organisation du travail et de gestion de leurs personnels, à encadrer la compétence des collectivités territoriales pour fixer les règles relatives au temps de travail de leurs agents ».

Le Conseil constitutionnel a donc rejeté la requête des quatre communes du Val-de-Marne. Il note pour étayer sa décision que « les collectivités territoriales qui avaient maintenu des régimes dérogatoires demeurent libres, comme les autres collectivités, de définir des régimes de travail spécifiques pour tenir compte des sujétions liées à la nature des missions de leurs agents ». Sur ce point, aucun doute, l’intersyndicale Ville CASVP UNSA, FO, UCP, CFTC, SUPAP-FSU restera mobilisée !