En 2015, une enquête de l’UFC-Que Choisir révélait des carences majeures dans la prévention de la dénutrition en EHPAD. Dix ans plus tard, le sujet reste tabou alors qu’il constitue un problème de santé publique majeur. Si l’âge modifie certains aspects du métabolisme, les besoins nutritionnels restent identiques tout au long de la vie adulte. Pourtant, trop de résidents en EHPAD peinent encore à s’alimenter correctement, avec des conséquences directes sur leur état général, leur autonomie et leur espérance de vie.
Un enjeu de santé majeur
La dénutrition n’est pas une fatalité liée à l’âge, mais un état pathologique évitable.
Elle résulte d’apports alimentaires insuffisants pour couvrir les besoins nutritionnels et peut être aggravée par plusieurs facteurs :
- Une perte d’appétit liée à une altération du goût et de l’odorat,
- Des difficultés de mastication ou de déglutition non prises en charge,
- Un isolement social, entraînant un désintérêt pour les repas,
- Des pathologies chroniques (maladies neurodégénératives, dépression, infections, fractures),
- Des régimes restrictifs inadaptés qui aggravent la perte de poids.
Les chiffres restent préoccupants : selon les dernières données disponibles, 15 à 38 % des résidents en EHPAD seraient en situation de dénutrition.
Un chiffre sous-estimé faute de suivi systématique et de repérage précoce.
Un constat partagé, des réponses limitées
Face à cette situation préoccupante, rapportée par de nombreux collègues qui travaillent au plus proche des résidents, un groupe de travail s’est formé à l’UNSA du CASVP pour alerter et proposer des améliorations.
Des responsables d’établissement, conscients du problème, cherchent aussi des solutions avec les moyens dont ils disposent. Mais sans cadre structurant ni engagement plus fort, les avancées restent limitées.
Des constats préoccupants
- Un cadre alimentaire inadapté : des horaires de repas dictés par l’organisation plus que par les besoins des résidents, un temps de jeûne nocturne souvent supérieur à 12 heures.
- Un suivi nutritionnel irrégulier : la pesée mensuelle, pourtant essentielle pour prévenir la dénutrition, n’est pas toujours réalisée.
- Une alimentation parfois inadaptée : apport insuffisant en protéines, en fruits et légumes, recours à des régimes restrictifs inappropriés.
Quels leviers d’action ?
Les recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS) et de la Haute Autorité de Santé (HAS) sont claires : prévenir la dénutrition repose sur des mesures simples mais essentielles :
- Adapter les repas aux besoins des résidents, en assurant une alimentation variée et équilibrée.
- Réduire le temps de jeûne nocturne, en proposant des collations adaptées.
- Créer un cadre plus convivial lors des repas, pour favoriser le plaisir alimentaire et éviter l’isolement.
- Renforcer le suivi nutritionnel, avec des pesées régulières et un repérage précoce des pertes de poids.
- Former les équipes aux enjeux de la dénutrition, pour mieux la prévenir.
- Associer soignants et familles à la réflexion sur la prise en charge alimentaire des résidents.
Les efforts existent, mais restent insuffisants face à l’ampleur du problème. Le repérage de la dénutrition et son traitement doivent devenir une priorité en EHPAD. L’enjeu est clair : faire de l’alimentation un levier de bien-être et de maintien en bonne santé, plutôt qu’un facteur de fragilisation supplémentaire.
