Dans le domaine des finances publiques, un principe fondamental garantit la bonne gestion des deniers publics : la séparation entre l’ordonnateur et le comptable. Ce mécanisme assure la transparence, la régularité et la légalité des opérations financières au sein des administrations.
Le rôle respectif de chacun
L’ordonnateur (l’exécutif local) ou ses délégataires ont un rôle important dans la gestion financière des deniers publics : ils ne manipulent pas l’argent public mais déclenchent la réalisation de la dépense ou de la recette.
Le comptable public, agent de la DGFIP, contrôle la légalité des opérations et procède au paiement de la dépense ou au recouvrement de la recette publique.
Un nouveau régime de responsabilité financière
L’ordonnance n° 2022-408 du 23 mars 2022, complétée par le décret du 22 décembre 2022, entrée en vigueur le 1er janvier 2023, modifie profondément le régime de responsabilité. Sans remettre en cause le principe de séparation, elle crée une responsabilité commune entre ordonnateurs et comptables publics. Elle a :
• supprimé la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics ;
• instauré une responsabilité harmonisée pour tous les gestionnaires publics ;
• modernisé les infractions ;
• créé une juridiction financière dédiée.
Toute « faute grave ayant causé un préjudice financier significatif » peut désormais être sanctionnée. Le caractère « significatif » du préjudice financier est apprécié au regard du budget de l’entité ou du service relevant de la responsabilité du justiciable.
Condamnations récentes dans la fonction publique territoriale
Depuis 2023, des agents territoriaux ont été condamnés à des amendes de 1 000 € à 20 000 €, dans le cadre de ce nouveau régime.
Les sanctions étaient calculées en fonction de la rémunération annuelle de l’agent et pouvaient jusqu’ici être plafonnées à 6 mois de traitement. Ce n’est plus le cas.
Décision du Conseil constitutionnel du 18 juillet 2025
Le Conseil constitutionnel, par décision du 18 juillet 2025, a invalidé ce dispositif. Le montant des amendes est désormais déconnecté des capacités financières des justiciables. Un facteur d’incertitude supplémentaire.
Pas de protection fonctionnelle
Par une décision du Conseil d’Etat en janvier 2025, il a été confirmé que la protection fonctionnelle ne s’applique pas aux gestionnaires publics poursuivis dans le cadre de cette responsabilité. Les agents sont seuls pour assurer leur défense, y compris financièrement.
Aucune protection juridique effective
Une circulaire du 17 avril 2025 émanant des services du Premier Ministre prévoit un simple soutien administratif aux agents concernés : un « accompagnement » et un « appui juridique, technique ou humain ».
Au CASVP, un risque réel
Avec des dizaines de milliers de mandats et de titres traités chaque année, des responsabilités éclatées, des chaines comptables longues et complexes, le risque d’erreur ou d’infraction involontaire est bien réel.
L’UNSA CASVP demande :
• La clarification des délégations de compétences et la mise en place d’un contrôle interne efficient pour limiter les risques ;
• Une information complète et une formation renforcée des agents impliqués dans la chaine comptable ;
• La garantie d’un accompagnement et d’une protection juridique des agents exposés.
Ne pas laisser les agents assumer seuls une responsabilité systémique. L’UNSA CASVP portera ce dossier à tous les niveaux – administration centrale, F3SCT, CST, et dialogue social Ville – pour que cette réforme ne devienne pas une bombe à retardement pour les agents.
