INDEMNISATION DES ARRÊTS MALADIE : UN RECUL QUI COÛTE CHER

Depuis le 1er mars, les agents publics en congé maladie ordinaire (CMO) ne perçoivent plus l’intégralité de leur rémunération pendant les trois premiers mois d’arrêt : l’indemnisation est désormais limitée à 90 % du traitement, alors même que le jour de carence reste appliqué. Cette réforme avait été présentée comme un levier pour réduire l’absentéisme et les dépenses publiques. Huit mois plus tard, les constats convergent : efficacité discutable, économies dérisoires et effets pervers qui s’installent, y compris dans les services de la DSOL.

Économies marginales, loin des ambitions affichées

Les données observées dans les collectivités montrent que la baisse d’indemnisation représente environ 0,17 % de la masse salariale pour les agents affiliés à la CNRACL.

À l’échelle d’un établissement ou d’une direction comme la nôtre, cela correspond à des économies très faibles, sans commune mesure avec les contraintes imposées aux agents.

L’enjeu budgétaire n’est pas au rendez-vous.

Aucune diminution de l’absentéisme

Les premières analyses disponibles, confirmées par les retours de terrain, montrent :

  • pas de baisse du nombre d’arrêts,
  • pas de réduction de leur durée,
  • une saisonnalité identique aux années précédentes.

Autrement dit, la mesure ne modifie pas les comportements.

Elle fragilise les agents sans améliorer la situation.

Des effets pervers qui s’accentuent dans les services

Plusieurs tendances se confirment dans les collectivités et apparaissent désormais dans nos directions :

  • Des arrêts parfois plus longs. La perte de rémunération ne joue pas son rôle de « frein » ; elle peut même inciter à prolonger un arrêt déjà engagé.
  • Une hausse des accidents de service et des temps partiels thérapeutiques (TPT). Dans les métiers exposés du CASVP (EHPAD, SSIAD, domicile, restauration, social…), la fatigue cumulée entraîne plus d’accidents, plus de rechutes et davantage de demandes de TPT.
  • Le présentiel « contraint ». La crainte de perdre 10 % de rémunération pousse certains agents à travailler en étant malades : état de santé aggravé, contamination des collègues, arrêts plus lourds ensuite.

Ce phénomène, déjà observé avec le jour de carence, se renforce.

Un impact direct sur le pouvoir d’achat et les conditions de travail

Pour les agents aux rémunérations modestes, très nombreux dans nos structures, la perte mensuelle est significative ; la protection statutaire s’affaiblit et la santé au travail se dégrade, notamment dans les métiers les plus pénibles physiquement.

Les services, eux, ne gagnent rien : remplacements compliqués, collectifs fragilisés, continuité de service sous tension.

A noter également : en mars dernier, l’UNSA a alerté la direction sur l’absence d’adaptation des règles indemnitaires au CASVP pour les agents en congé pour raison de santé. Depuis avril 2025, le décret 2022-632 (maintien des primes en PPR) et le décret 2024-641 (maintien partiel des primes en CLM) sont enfin appliqués. Sans l’intervention de l’UNSA, cet oubli aurait perduré au détriment des agents concernés.

La réforme montre ses limites : elle pénalise les agents, ne réduit pas l’absentéisme et crée des effets pervers. La lutte contre l’absentéisme passe par de meilleures conditions de travail, une prévention organisée, un maintien de rémunération assurant un arrêt digne et l’analyse des causes réelles: pénibilité, sous-effectifs, surcharge, organisation. La santé au travail n’est pas un levier d’économie. Elle conditionne la qualité du service rendu.